Heart: The City Beneath, c’est mon jeu de coup de cœur du moment. Pas qu’il soit sorti le mois dernier mais c’est ce mois-là où j’ai pu le mener pour la première fois. Je l’ai découvert parce que Karla, alors qu’elle maitrise Spire pour moi, m’a balancé un « Tu sais que les gars de Spire, ils ont sorti un dungeon crawling dans le même univers ? »
J’adore Spire. Ça a la classe d’être bienveillant dans son écriture et complètement déjanté sombre dans son univers. En plus c’est un jeu qui est intrinsèquement (et oui avouez que c’est le mot qu’on place pas si souvent) narratif, tourné sur les relations avec autrui et pétri d’intrigues jusqu’à l’indigestion dans une volonté de bac à sable débridé. Du coup, je voyais mal comment des gars pareils pourraient vouloir faire du run de donjon. Pas que je ne les en pensais pas capables, juste que je ne les imaginais pas là.
Résultat, j’ai téléchargé le quickstart et j’ai même lancé une partie. Sachez que Karla vend très mal les jeux qu’elle a pas encore lu, en même temps Heart s’avère bien un dungeon crawling. Un paradoxe qui clairement m’a pris aux tripes, m’a fait sourire et m’a fait acheter le livre de base et deux extensions dans la foulée. Du coup pour patienter je vous propose une petite review du Quickstart !
Heart: The City Beneath, c’est ma trouvaille du moment ! Dispo chez l’éditeur anglais Rowan, Rook & Decard, ce quickstart d’une cinquantaine de pages est disponible en “pay what you want”.
Contexte moi !
Spire (Et je vous invite à aller lire la critique de Karla) c’est un jeu dans lequel vous incarnez la résistance drow face à l’oppression aelfir dans la ville de Spire. C’est de la fantasy punk et c’est totalement fou. L’univers est bariolé comme un camion de pompier volé mais reste cohérent avec lui-même et surtout il s’avère jubilatoire dans ses campagnes et dans ses concepts. Sachez que mon perso a tenu une boulangerie, a visité la campagne champignonnière et a intégré une troupe de théâtre, tout ça dans l’exercice de ses fonctions.
Heart reprend l’action dans la même ville mais lasitue en dessous, en commençant à son plus bas étage, Derelictus. Cette strate était déjà décrite comme étant la décharge occulte, toxique et pourrissante de la ville de Spire et dites-vous bien, là, on vous dit que c’est l’endroit le plus sain de la ville d’en dessous. Avouez que c’est tout un programme ! Cet endroit est appelé pudiquement Le Cœur et je vous partage la description traduite du livre :
“Sous la ville en ruines de Spire se trouve le Cœur : une ville souterraine, un labyrinthe maudit, où la réalité s’étiole alors qu’une dimension parasite empiète sur le monde de la surface à travers viande, pierre et dents. C’est un royaume construit et reconstruit sur les ruines des civilisations qui ont tenté de l’apprivoiser, ou simplement la comprendre, et ont échoué.
Elle est faite de temples aux morts où les dieux pourrissent dans des cavernes sans lumière, de rues construites par des mains sillonnant les colonies dans des formes absurdes, de grandes machines rouillées dont le but est oublié depuis longtemps, grondant et grattant dans l’obscurité.”
Ici on joue des gars qui tentent de ne pas succomber à l’attrait des abysses nauséabondes où ils vivent.
Propose-moi des trucs !
Donc dans le Quickstart, vous avez 5 prétirés avec chacun une des classes iconiques de Heart (il y en a plus dans le jeu complet) et chacun a ses raisons de regarder dans l’abîme. Ces personnages sont pourvu d’une fiche recto-verso avec leurs capacités et en verso une explication poussée des pouvoirs et des évolutions possibles.
Pour les faire jouer, un scénario sobrement appelé « Noyé » est proposé. Cette campagne s’axe sur des lieux (et les histoires qui s’y déroulent ainsi que le fil conducteur du scénario) ainsi que les « delves » qui représentent les chemins à explorer pour les rejoindre.
Le tout est relativement bien écrit et ne demandera pas trop de réécriture de la part du MJ. C’est surprenant (rien que le début devrait prendre de court vos joueurs), les PNJ sont hauts en couleurs (et ils sont magiques croyez-moi). La conclusion vous fait bien comprendre que toute la démente course n’est qu’un jour normal dans la Cité en dessous, autre nom du Cœur.
Attention que le jeu se veut horrifique et qu’il aborde divers triggers. Transformation corporelle, violence physique et mentale, corruption latente sont au rendez-vous. Prévoyez un système de lignes et de voiles et/ou une “X Card” pour assurer à tout le monde un jeu safe (expliqué dans l’ouvrage)
Fais-le dans les règles !
Le système de Heart devrait plaire aux amoureux des systèmes fluides. Tout d’abord, on ne jette les dés que s’il y a un enjeu. C’est-à-dire si le joueur risque de perdre quelque chose s’il échoue.
Exemple : Vous désirez retrouver vos chemins dans les tunnels tentaculaires (au sens propre et c’est sale d’ailleurs) et vous convenez avec votre MJ qu’en cas d’échec, vous risquez d’y laisser une partie de vos rations. Enjeu clair «Trouver son chemin » et dans la balance une augmentation du stress en provision.
Vous jetez les dés comme suit : Un D10 auquel vous ajoutez encore un dé si vous avez la compétence et un si vous avez le domaine (ou autre spécialisation/bonus situationnel) et vous gardez le meilleur et c’est à vous de décrire le résultat.
Vous remarquerez que le système est tourné vers le joueur. Le MJ ne jette pas souvent les dés. En fait, il ne les jette que pour quantifier le coût de l’échec chiffré et vérifier que cela n’entraîne pas des conséquences imprévues. Le reste du temps, il laisse le PJ mettre en scène son résultat. Ça marche bien, c’est même sympathique et surtout quand on est MJ, on apprend à faire confiance à son joueur pour assumer ses réussites et échecs. Et si vraiment on a une idée de mise en scène, c’est toujours possible de la proposer au joueur.
Reste à vous parler des Fallouts et des Jauges. Les Jauges c’est vos différentes sources de stress (l’équivalent des caractéristiques ici). Elles sont autant physiques que mentales en passant par la chance et votre équipement ainsi que la résistance à la corruption. Selon vos jets et l’histoire, vous accumulez des points dans les différentes jauges et ça provoque parfois des retombées (fallouts). Là c’est le MJ qui jette le dés, propose un des fallouts possibles au joueur ou laisse le joueur faire sa proposition et l’histoire continue.
Sincèrement ça tourne facile, c’est ludique et j’ai eu des petites descriptions des joueurs des accrocs dans l’action de leurs personnages bien sympathique.
Tout est compris dedans alors ?
C’est sans doute là que la frustration est inévitable. Le Quickstart n’est pas le jeu complet. Clairement il ne va pas vous lister en profondeur les informations nécessaires à pleinement jouer vos persos ou donner tous les aboutissants des fiches. L’objectif est d’esquisser l’univers. Ça peut frustrer les joueurs qui aiment les contextes complets pour pouvoir interpréter et il faudra broder un peu et accepter d’être un tout petit peu largué si on a pas lu Spire (Spire partageant son univers, on trouve des infos déjà abordées dans l’autre gamme).
En bref
J’ai aimé. Ça m’a pris un weekend pour le lire, j’ai proposé une table rapidement et j’ai senti que l’histoire tournait facilement avec mes joueurs. Ça m’a fait sauter le pas et j’ai commandé une partie de la gamme (j’essaierai d’en faire une review complète).
En attendant, je vous conseille d’aller sur le site de l’éditeur anglophone, ou bien d’aller martyriser les Barbus pour qu’ils éditent la VF !