Quand le jdr ALIEN est sorti, pas mal de rôlistes en ont parlé, et toujours en bien. À ce moment-là, j’avais eu du mal à trouver un angle qui aurait été différent des revues déjà publiées. Mais voilà, l’ami Orion (du blog Autour d’Orion) m’a demandé un retour sur le jeu (et sur ses règles en particulier).
Alors comme je ne peux rien refuser à un confrère-en-jdr, et que j’ai vraiment aimé ALIEN, voici un petit aperçu de ce qui m’a plu suite à ma maîtrise du scénario Le Chariot des Dieux, un excellent exemple de ce qu’ALIEN a dans le ventre.
Fiche technique
Ce livre, richement illustré, présente le monde d’ALIEN en 2183, ainsi que des règles brèves et efficaces conçues pour vous faire vivre une expérience intense dans cet univers. Le jeu comprend deux modes distincts :
Le Mode Cinéma se base sur des scénarios rédigés pour reproduire le déroulement dramatique d’un film de la franchise ALIEN. Conçu pour une seule séance de jeu, ce mode rapide et brutal met l’accent sur l’urgence et les enjeux vitaux. Vous n’êtes pas tous censés survivre. Le livre de base contient un scénario d’introduction en Mode Cinéma, « Le Dernier Jour de Hope ».
Le Mode Campagne est conçu pour jouer en continu avec la même équipe de personnages joueurs sur plusieurs séances de jeu, afin d’explorer librement l’univers d’ALIEN dans un environnement en bac à sable. Ce livre de règles contient des tables aléatoires et d’autres outils qui vous permettront de créer des systèmes stellaires, des colonies, des missions, des rencontres et des PNJ pour votre campagne.
ALIEN transcende les films en peignant un univers rétro poisseux où l’espoir a été sacrifié au nom du profit.
Tout d’abord, un rapide descriptif du jeu ALIEN. ALIEN est un jeu de rôles sorti chez Arkhane et qui permet de vivre des aventures dans l’univers étendu d’Alien. Un mélange de rétro-futurisme, de pessimisme sacrément sordide et de slasher xénomorphe. Encore que, et c’est important de le mentionner, l’Alien en lui-même n’est pas le centre de l’univers du jeu mais une de ces composantes.
En ce qui concerne le scénario du Chariot des Dieux, c’est glauque, assez anxiogène et parfois y a des aspects sacrément gore. Une petite discussion avec vos joueurs d’abord me paraît un bon préambule afin de vérifier les limites de chacun-e, et vous pourrez profiter de l’occasion pour prévenir que la mort sera présente et totalement violente. On pourrait dire que c’est à l’image des films, et clairement je vous rejoins, mais précisons que ce n’est pas un jeu à mettre dans toutes les mains.
Un système à l’image des films, des dés qui s’emballent lorsque l’horreur monte et aucune échappatoire.
Le système est relativement simple, à base de D6. On ne jette des dés que quand cela est nécessaire (et de préférence, pas trop souvent du coup). Pour réussir son action, il faut faire au moins un « 6 ». Si vous en faites plusieurs, votre action sera encore plus éclatante. Seul défaut à mon goût, c’est que pour les actions d’opposition, entre plusieurs protagonistes, le « 6 » peut mettre du temps à sortir et faire s’éterniser un peu le combat.
Le jeu vous propose ensuite un système de montée en tension à travers deux mécanismes.
Le premier c’est le Stress. Le stress, vous allez en acquérir à chaque fois que vous tentez de relancer un jet de dés, voyez un ami crever, découvrez qu’on n’est pas seul dans l’espace, entendez hurler de panique un pote – souvent, donc. En termes de jeu, le stress se concrétise par un ou plusieurs dés jaunes que vous rajoutez à votre jet classique. Si un dé de stress indique un « 1 », vous effectuez un jet de Panique qui détermine la réaction du personnage. Ce dernier jet entraine bien souvent du stress supplémentaires, et peut finir par avoir raison de la volonté du personnage.
L’autre mécanisme de montée en tension concerne la gestion des ressources, aléatoires. On ne va pas décompter une à une les balles de son chargeur ou les heures qu’il reste dans la réserve d’oxygène. A la place, on lance des dés de réserve. En cas de « 1 », on perd une unité de la réserve. Vous l’aurez compris, c’est quand vous allez en avoir le plus besoin que ça va vous manquer.
Ces deux mécanismes combinés vont rythmer vos parties et épuiser vos personnages. D’expérience personnelle, j’ai synchronisé les pauses hors-jeu et en jeu afin de maintenir cette tension. Fun fact, mes joueurs baissaient aussi leur garde pendant ces moments de tranquillité (exactement comme leurs personnages), et cela a permis aux traîtres parmi les PJ d’avoir les coudées franches pour réaliser leurs sombres desseins.
Des mécanismes au service du groupe et de l’ambiance autour de la table.
On parlait tout à l’heure d’avoir une discussion avec les joueurs sur les thèmes abordés. Cette discussion permettra aussi d’aborder deux mécanismes propres à l’univers.
Tout d’abord la mort est omniprésente dans le jeu (y compris en mode scénario). Lorsqu’un personnage est tué (et les occasions ne manqueront pas), le MJ proposera de jouer un des PNJ survivants, et le jeu reprend assez vite. Le scénario est d’ailleurs conçu pour offrir une galerie de candidats au fur et à mesure de l’évolution de la trame. Ces PNJ ont un back simple mais surtout des objectifs qui vont permettre au joueur de réintégrer le jeu rapidement.
Ensuite, ALIEN propose parmi ses pré-tirés une belle galerie de traîtres qui agiront même si c’est pour survivre seulement 10 minutes de plus. Le PVP (opposition joueur contre joueur) n’est pas toujours habituellement la norme autour d’une table, et il peut parfois amener une certaine frustration. Le jeu propose ici une solution élégante. Lorsqu’un PJ s’en prend aux autres, le MJ gère la scène entre les personnages et ensuite le traitre (s’il survit), devient PNJ. Il continuera à agir pour le bien du scénario global mais il n’y aura pas de ressentiment face au joueur “traître”. Ce dernier pourra récupèrer un nouveau personnage au sein du stock de PNJ disponibles et continuer à jouer avec les autres.
Franchement, pour un non-adepte du PVP comme moi, j’ai pris du plaisir à littéralement tuer des gens et les monter les uns contre les autres. Et ils ne semblent pas avoir souffert du processus !
En bref
La gamme ALIEN assume son héritage et offre de la fatalité à la sauce capitaliste spatiale. Rien que pour ça le jeu en vaut le détour.
Là où il marque encore plus de points, c’est dans ses scénarios. Les histoires sont de magnifiques hommages qui plongeront vos joueurs en enfer – et ils vont en redemander. Ils hurleront, trahiront, seront dévorés… mais toujours avec le sourire.
Cette expérience autour d’une table (même virtuelle), c’est la garantie d’une soirée réussie. Idéalement vous finissez la partie en vous plaignant d’avoir mal au ventre, et vous vous arrangez pour faire sortir un facehugger de votre T-shirt ! Un classique indémodable !