Review (VF) : Gods

Quasi 4 ans qu’on attendait fébrilement ce jeu chez Arkhane Asylum Publishing. La promesse d’un jeu de dark fantasy façon Sword And Sorcery à la Conan le Barbare ou Bloodlust dont Gods partage clairement un bout de pitch. Une équipe qu’on peut qualifier de “all stars” achevait de monter la hype de la communauté. Le jeu est finalement arrivé chez les “pledgeurs” européens, sous le sapin de Noël. Quelques jours après, voici ce qu’on en pense.

J’avais pris le Pack Élu, ce qui me permettait d’avoir, en relié, le Livre de base, le Livre de l’Oracle (MJ), mais également des très jolies cartes, quelques dossiers du joueur (fiches de persos reliées), un set de dés, un livret de scénars et quelques illus imprimées qui vont bien. 

L’auteur de l’univers est Bastien Lecouffe Deharme, (et son équipe d’illustrateurs et d’illustratrices triés sur le volet). Il est connu par la plupart pour son talent d’illustrateur. Au système : Julien Blondel, un vétéran du petit monde rôlistique francophone, qui adapte ici son système TOTEM qu’on retrouve également dans son dernier jeu Vermine 2047 sorti il y a peu. Et cerise sur le gâteau, en cartographe : Olivier Sanfilippo, aussi talentueux que sympathique, habitué de nos vidéos pour l’Empire des cerisiers tout autant qu’il est un charmant compagnon pour deviser.

Fiche technique

Éditeur : Arkhane Asylum Publishing
 
Résumé :
GODS est un jeu de rôle de Dark Fantasy de Bastien Lecouffe-Deharme et Julien Blondel. C’est avant tout un jeu d’aventures, de quêtes épiques et d’exploration dans un monde brutal inspiré des classiques du genre

Premier contact
Dans cette belle brique qu’est le Livre de base, la première chose qui marque, comme je l’ai laissé entendre via la présentation de l’auteur, est la qualité visuelle générale. Des dessins évocateurs, sombres qui posent l’ambiance de l’univers. Le regretté Frazetta n’aurait pas renié les belles et grandes illustrations double pages des nations (et de nombreuses autres illus, merci bien), quelques illustrations en noir et blanc pour, notamment, le bestiaire.
Le livre n’est pas avare et fourmille de détails visuels qui servent l’atmosphère générale, les illus sont très nombreuses, le bouquin peut se le permettre vu l’épaisseur de l’œuvre.

La grosse première moitié du bouquin (260 pages sur ~480) est dévolue au background historique et géographique de l’univers. Ensuite on passe à la partie démographique avec l’explication en détail des 13 pays (mais 14 origines jouables) remplissant le continent appelé : “Les Terres Sauvages”. Aucun secret dévoilé ici, ces derniers sont réservés au Livre de l’Oracle.

Des pages 260 à 300, on a la partie “système” qui nous explique comment tourne le jeu.

La cinquantaine de pages suivantes (jusqu’à la page 345 en fait) nous explique comment créer un groupe, un personnage, un “éclat” (j’y reviendrai).

La centaine de pages restantes se divisent entre l’équipement, les rituels magiques et le bestiaire. Et enfin les magnifiques cartes de chaque nation.

Les Terres sauvages

Tout comme Conan ou autres univers du genre, Gods s’inspire des grands classiques : des versions réinterprétées de nos grandes nations : les Romains, la Grèce antique, les Vikings, l’Afrique mystérieuse, etc… Certaines inspirations sont plus visibles que d’autres. Mais dans l’ensemble, passé le clin d’œil bien utile pour résumer et se faire une idée générale de ce qui nous plait comme style de jeu, les nations prennent rapidement une teinte originale. Elles sont bien sombres et désespérées, big up notamment au “Saeth” qui donne envie de se flinguer tellement ils sont au bout du rouleau.

On a en réalité un monde post-apo qui oscille entre Antiquité et un Moyen-Âge rempli de mystères, d’anciens dieux morts, oubliés ou disparus depuis 1000 ans. Pendant ce temps, un dieu unique, le “Soleil Noir” essaie de s’imposer un peu partout, en général par la force.

On joue au début d’un Second Âge, qui sonne comme une deuxième chance pour l’Humanité : les nations se sont relevées et reconstruites tant bien que (souvent) mal et tout le monde se méfie de son voisin tout en convoitant ses richesses. Bref vous l’avez compris, l’univers a un parfum de grosse rigolade à tous les étages (humhum).

Des cartes, des cartes oui mais des cartes Filippo !

Les élus
Et que jouez-vous là-dedans ? Et bien des “Élus” ! Des humains qui à un moment sont entrés en contact (ou sont amenés à le faire) avec un “éclat” : un objet manufacturé par la main de l’Homme et insufflé par l’essence d’une ancienne divinité oubliée.

Le système TOTEM propose de créer un personnage articulé principalement autour de 8 caractéristiques chiffrées qui couvrent tous les aspects physiques, mentaux, sociaux et manuels d’une vie d’aventures. Vous lancez autant de D10 que l’attribut adéquat et vous ajoutez les bonus des compétences. Vous devez battre une difficulté entre 5 et 9 en général.

Vous avez ensuite les compétences qui ont la bonne idée de ne pas rajouter trop de dés dans vos jets (de 1 à 2, et 3 à très haut niveau), mais qui permettent surtout des relances. Cela représente bien le fait qu’une maîtrise d’un domaine de compétence permet de combler des lacunes. Vous aurez aussi des “handicaps”, qui ajoutent une difficulté au jet, il faudra plusieurs réussites si vous le tentez sans le maîtriser et si la compétence est rare (comme magie, occultisme, mécanique,…), ou si l’opposition est compliquée par un élément extérieur (météo, terrain, …)

Vient enfin la mécanique de “Réserve” : votre personnage pourra utiliser 2 réserves de dés, une avant et/ou une après son jet, afin d’augmenter ses chances. Ces réserves remontent avec le repos, la bouffe et le délassement. Le “Sang-froid” et “l’Effort” s’utilisent respectivement avant le résultat de votre jet et après le résultat. Ils vous permettent de gérer un petit bonus supplémentaire si vous avez vraiment besoin de réussir une action. Ces réserves seront également affectées négativement par votre état : blessures physiques et mentales (peur, moral, …)

Le système

Vous l’aurez compris, il est facile d’accès mais en réalité possède pas mal de spécificités qui le rendent beaucoup plus difficile à maîtriser qu’il n’y paraît (ce que sans doute certains ne prendront pas la peine de faire). Outre les personnages, et les règles de jeu et de combat, il y a la création de l’éclat divin de votre personnage (divinité qui vous octroie ses pouvoirs si vous écoutez et obéissez à ses désirs) ainsi que du groupe (carcan de motivations et buts communs). Ça rend le lancement d’une campagne peut-être un peu ardu mais, dans la longueur, promet sans doute de permettre à votre table de joueurs de se rappeler ce qui avait été établi, un contrat social qui est en partie intégré au système de jeu.

Le jeu possède des guides indicatifs de roleplay à foisons: entre autres, les instincts, sortes de code moral et philosophique pour les personnages et les groupes. Tout ça est très bien, mais cela reste un investissement (de mémoire) qu’il faut arriver à passer avant de lancer une campagne (dans laquelle les joueurs n’essayeront pas de s’écharper car le background de leur peuple dit qu’ils se détestent et que leur éclat leur communique des pulsions meurtrières).

L’Oracle

Je n’aborderai pas le Livre de l’Oracle ici. Il fait la lumière sur des secrets nombreux, autant d’accroches et d’idées pour des fils rouges et des révélations durant vos campagnes. Il y a également des scénarios.

Rajoutez à cela le scénar d’intro du Kit de découverte et les scénarios dans le livret “Aventures dans les Terres Sauvages”. Ce qui complète en gros ce qu’on attend d’une gamme à sa sortie, sauf, bémol, une bonne grosse campagne qui j’espère arrivera un jour (prochain) (si possible rapidement SVP).

En vérité, on voulait faire un album pour enfants et on sait pas quand on a merdé !

En bref

Belle et rebelle, cette œuvre ne déçoit pas, elle ne se livre pas aussi facilement que je le croyais et fourmille de détails à ne pas louper à chaque paragraphe. Autant de petits boulots préparatifs tant pour le MJ que pour les joueurs à la création de leur avatar.

Il s’intègre dans la lignée des très beaux JDR comme Degenesis avec qui il partage également un univers foisonnant de secrets qu’il faudra maîtriser avant de se lancer. Pour les plus anciens, le coucou à Bloodlust est très palpable également. Enfin, comme je le disais, le souffle épique de Conan sur votre nuque est présent tout au long de la lecture.

Si ces quelques références n’achèvent pas de vous convaincre, c’est sans doute que le style n’est pas votre dada et ça serait bien normal. La dark fantasy poisseuse et désespérante (dans ses thèmes) c’est, j’ose le dire, réservé à un public averti.

 

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